Le plus grand lac d'Amérique du Sud est photographié depuis l'espace : mais ce "beau vert" n'est pas une bonne nouvelle
Les photos de l'espace ont toujours quelque chose d'incroyablement fascinant. Nous avons tous vu celles prises par les astronautes à bord de l'ISS, dirigées vers un monde qui semble si petit et si extraordinaire. Récemment, la mission ESA Copernicus Sentinel-2 a saisit une vue spectaculaire du lac Maracaibo au Venezuela. Pourtant, la beauté de la photographie cache un mystère lié à la crise environnementale et aux effets des activités humaines.
L'importance du lac Maracaibo pour le Venezuela
Wilfredor/Wikimedia Commons - CC0 1.0 DEED
Le lac Maracaibo s'étend sur environ 200 kilomètres à l'intérieur des terres du Venezuela, mais il est relié à la mer des Caraïbes par un étroit détroit. Il s'agit d'un plan d'eau d'une superficie de plus de 13 000 kilomètres carrés, considéré comme le plus grand lac d'Amérique du Sud. Sa nature de bassin connecté à la mer se reflète également dans ses eaux : plus salées au nord, plus douces au sud en raison des nombreux fleuves qui se jettent dans le lac. De plus, à l'embouchure du fleuve Catatumbo sur le Maracaibo, se forme ce panache jaunâtre caractéristique que l'on peut observer sur la photo.
En somme, le lac Maracaibo revêt une importance indéniable du point de vue naturel et, en même temps, pour les activités humaines. Le Venezuela a exploité les gisements pétroliers qui entourent le lac, au point de faire de la ville de Maracaibo le deuxième centre du pays après Caracas. À l'ouest du lac se trouve Maracaibo, à l'est se trouve Cabimas, un autre centre essentiel pour l'industrie pétrolière. Et c'est précisément cette dernière qui est la cause d'un phénomène qui, ave cun regard superficiel, pourrait même sembler beau à voir.
Le lac Maracaibo vu de l'espace : le secret du vortex
ESA - CC BY-SA 3.0 IGO
Malgré sa beauté visible depuis l'espace, le lac Maracaibo est sérieusement en danger. Entouré de gisements pétroliers sous-marins et côtiers, il paie le prix de l'industrialisation qui a fait du Venezuela l'un des principaux exportateurs de pétrole au monde. Au fil des années, le lac Maracaibo a été continuellement contaminé par d'énormes quantités de polluants, provenant de fuites d'oléoducs, d'eaux usées et du débit des rivières, un phénomène malheureusement visible également sur la photo prise par Copernicus Sentinel-2.
La teinte émeraude de la photo, prise en août 2023, est due à des floraisons incontrôlées de cyanobactéries toxiques. Également connues sous le nom d'algues bleu-vert, ces cyanobactéries représentent une menace grave pour l'écosystème et la santé humaine. C'est précisément là que l'utilité de Copernicus Sentinel-2 réside : grâce à ses capteurs multispectraux à 13 bandes, le satellite peut détecter les floraisons d'algues nuisibles et mesurer la clarté de l'eau. Une connaissance fondamentale pour la préservation du lac et de la santé, à condition que les autorités compétentes tiennent compte des observations.
L'initiative des Vénézuéliens pour sauver le lac Maracaibo
Comme nous l'avons vu, la situation du lac Maracaibo est critique, et c'est presque ironique qu'une photo prise depuis l'espace le rende si beau. La réalité est cependant différente, au point que les citoyens du Venezuela ont réagi à la crise du lac. L'association écologiste Proyecto Sirena a en effet lancé une initiative extraordinaire en commençant à collecter des cheveux dans les salons de beauté, auprès de personnes ordinaires et en impliquant également le public via Internet. Ces cheveux, donnés pour le lac Maracaibo, seront utilisés pour créer des bras flottants qui pourraient prévenir la propagation des taches de pétrole à sa surface.
Il s'agit d'une initiative admirable, rendue nécessaire en raison de politiques économiques qui ont mis en danger l'ensemble de l'écosystème du lac Maracaibo. L'espoir est que les prochaines photos de l'espace puissent nous donner une image d'un lac dans des conditions meilleures : ce serait tout aussi beau, voire même plus.